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Hildegarde de Bingen (1098 – 1179) : les 5 facettes de sa vie passionnante, édité le 28 08 2015

Hildegarde de Bingen (1098 – 1179) : les 5 facettes de sa vie 

Vb 08 2015

1 – Biographie

Elle est née en 1098 en Hesse rhénane et à l'âge de 14 ans, fin 1112, elle entre au couvent contemplatif de Disibodenberg. Peu après son entrée au couvent, vers 1115, donc entre l'âge de 15 et 18 ans, elle prononce ses vœux perpétuels.

En 1136, à 38 ans, elle devient abbesse de son couvent.

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A 43 ans, elle commence de mettre par écrit ses visions. Par la suite, elle entre en conflit avec son propre couvent, tombe à nouveau malade, et finalement fonde un nouveau couvent avec vingt de ses nonnes au Rupertsberg. Et lorsqu’il s’agira pour elle, devant l’afflux des vocations, de fonder une autre abbaye, elle n’ira pas non plus bien loin. Le monastère d’Eibingen, qu’elle ouvre environ vingt ans plus tard, est lui aussi tout proche.

Elle a eu au moins 5 activités et facettes dans sa vie : docteur de l’Eglise, abbesse et mystique, conseillère des princes, linguiste, musicienne et apothicaire et diététicienne.

Elle meurt le 17 septembre 1178, à 81 ans, au milieu de ses nonnes et fut canonisée en 1243. De nombreux miracles (guérisons) lui sont attribués.

 

1 – docteur de l’Eglise, abbesse et mystique

En 1141, à l’âge de 43 ans Hildegarde reçoit ses premières visions. Elle deviendra un auteur mystique reconnu ; elle reçoit de Dieu l'ordre de mettre par écrit ses visions. Elle ne le fit qu'avec beaucoup de réticence et tombe même gravement malade. Ses premières visions sont consignées dans le Scivias (= sci vias Dei, " Connais les voies de Dieu").

Elle avait hésité avant de faire connaître ses visions et quand elle se décida, son témoignage fut d’abord accueilli avec une certaine méfiance par les autorités ecclésiastiques, avant qu’une enquête lève le doute sur l’authenticité de ses visions. Bernard de Clairvaux, qui assiste au synode réuni à Trèves, à la fin de 1147, par le pape Eugène III, prendra la parole pour dire, selon le vœu de tous, qu’il faut « se garder d’éteindre une aussi admirable lumière animée de l’inspiration divine ».

Elle a eu 30 années de visions et trois recueils de ses visions ont été publiés : le Scivias (rédigé entre 1147 et 1151), le Livre des mérites de vie (1158-1163) sorte de traité de psychothérapie, et le Livre des œuvres divines ou « L'homme, œuvre de Dieu » (1163-1173).

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Ses trois grands livres de visions, dont le célèbre Scivias, décrivent un univers infini, en expansion perpétuelle, proche de celui des astrophysiciens actuels.

Elle écrivit de nombreuses lettres qui nous sont très précieuses pour la compréhension de sa vie et de son œuvre, ainsi qu'un traité sur la Règle de Saint Benoît, sur le symbole de Saint Athanase, la Vita sancti Ruperti et la Vita sancti Disibodi (moine irlandais du 7 ème siècle fondateur de son couvent).

Mais ses visions d’une flamboyante intensité renouvellent l’expression des mystères de la Bible transmis par l’Église, dont elles livrent une lecture allégorique, des récits de création jusqu’à l’Apocalypse. Certaines d’entre elles semblent aussi annoncer la relecture de la Parole que feront bientôt des ordres mendiants.

On comprend que ces pages incandescentes aient inspiré Dante Alighieri, lorsqu’il composa, deux siècles plus tard, la Divine Comédie, le chef-d’œuvre de la langue italienne naissante.

Hildegarde, béatifiée en 1244 par Innocent IV et inscrite comme sainte au Martyrologe romain à la fin XVIe siècle a été proclamée Docteur de l'Eglise le 7 octobre 2012 par Benoît XVI, en compagnie du théologien espagnol Jean d'Avila, faisant d'elle la quatrième Docteur de l'Église femme après Catherine de Sienne, Thérèse d'Avila et Thérèse de Lisieux.

 

2 – conseillère du pape, des évêques et des princes

Au cours des voyages qu’elle entreprit à partir de 1158, elle ne cessa en effet d’inviter l’Église de son époque à retrouver l’authenticité de la foi, n’hésitant pas à admonester les « grands » lorsqu’ils s’écartent du droit chemin, qu’il s’agisse du Pape, de l’empereur d’Allemagne, des évêques de Mayence, Cologne, Würzburg, Trèves ou Bamberg. Trois papes successifs ont écouté ses conseils inspirés, ainsi que l'empereur d’Allemagne, le roi d'Angleterre Henri II...
Ses prêches résonnent dans les cathédrales de Trèves, Cologne, Mayence. Par milliers, les gens la sollicitent et les plus hautes autorités la consultent, comme indiqué ci-dessus. C'est l'époque où les papes eux-mêmes savent demander conseil à une femme, simple moniale !

3 – linguiste

Hildegarde est aussi connue dans le domaine linguistique car elle élabora une langue artificielle écrite et parlée par elle seule, la Lingua Ignota avec un alphabet inconnu crée par elle (Litterae ignotae). Le Lingua ignota propose une terminologie latine et allemande nouvelle dans des domaines aussi variés que l'angélologie, les structures sociales, les animaux et les plantes.

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C’est la facette de sa personnalité qui est la plus étrange, à mon avis, et la moins passionnante.

4 – musicienne

Pour Hildegarde, la musique est la forme la plus élevée de toute activité humaine

Elle compose durant sa vie 77 symphonies, pièces musicales écrites sur ses propres poèmes religieux et destinées à être chantées lors des cérémonies du couvent.

Elle a aussi composé un drame liturgique intitulé Ordo virtutum, qui comporte 82 mélodies et qui met en scène les tiraillements de l'âme entre le démon et les vertus.
Ces éléments apportent un sens nouveau de la vocalité et fait de ses œuvres de véritables visions en musique. Les motifs, jamais figés, élèvent l'auditeur par leur fluidité et leur force. De plus la subtilité de ces enrichissements fleuris ajoutait à la ligne mélodique des envolées qui invitent à la méditation

 Certains ont fait au cours des vingt dernières années l’objet d’enregistrements qui ont fait d’elle un presque best-seller du disque. En 1995, alors que Canto Gregoriano, une compilation déjà ancienne faite par les moines de Silos s’arrachait à plus d’un million d’exemplaires dans le monde, dont 100 000 en France, Les chants de l’extase, par l’ensemble Sequentia, atteignaient le chiffre record de 80 000 exemplaires en France avec une pochette qui reproduisait une peinture d’Hildegarde

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À côté de versions relookées « post-moderne style » comme Vision où « Ses valeurs religieuses et écologiques rejoignent nos propres préoccupations New Age », certains enregistrements réalisés par des ensembles de musique médiévale sont de véritables merveilles, comme par exemple l’anthologie de pages d’Hildegarde consacrée à la Vierge enregistrée sous le titre Sponsa regis par l’ensemble féminin La Reverdie.

Sur YouTube il y a plus de 40 enregistrements (voix et orchestre) de sa musique : j’ai aimé celui de Marisa de 2009 sur « O dulcis divinitas » un extrait de « Ordo virtutum ».

5 – apothicaire et diététicienne

Hildegarde eut aussi une grande activité de médecin et de naturaliste. On lui attribue notamment 3 livres : la Physica ou Liber subtilis medicinae, le Causae et Curae et le Liber compositae medicinae.

Elle décrit les remèdes connus à son époque en les classant selon leur origine, leur préparation et leurs propriétés. Elle prescrivait ainsi des baies de genièvre contre les maux de ventre, mais conseillait également au patient de changer de conduite car il avait dû commettre le péché de gourmandise.

«L'homme, œuvre de Dieu», est une description minutieuse de tous les processus métaboliques à l'intérieur de l'homme, ceci pour fournir une analogie avec l'âme, pour expliquer et faire comprendre cette chose prodigieuse que nous appelons «âme».
Hildegarde nous donne cette vision de «l'homme total» (corps âme et esprit), en nous conduisant aux sources de la santé. Elle nous enseigne que nous ne pouvons vivre en pleine santé sans retrouver notre unité intérieure. Cette vision de la santé nous conduit donc à considérer l'être humain sous trois aspects : physique, psychique et spirituel. Il serait superficiel d'envisager la santé sur le seul plan corporel ; le corps étant mortel, cette sorte de santé serait tôt ou tard vouée à l'échec. Hildegarde nous convie donc à l'envisager aussi sur le plan de l'âme, qui est le noyau de notre existence et qui est immortelle.
L'homme a plus de puissance que les autres créatures. S'il est petit de stature, il est grand de par l'âme. Cela lui donne une énorme responsabilité sur la manière dont il doit prendre soin du patrimoine précieux qui lui est confié. Il n'en est pas le propriétaire mais le gérant : elle était déjà très écologique !!
Ses conseils, en particulier pour la santé, eurent un grand retentissement aux 12 e -13 e siècles, puis sont tombés dans l’oubli, sauf pour la consommation régulière de l’épeautre. En effet, l’épeautre qui contient les 8 acides aminés essentiels et riche en calcium, phosphore et magnésium, est, d’après Hildegarde, une céréale réchauffante et purifiante pour l’homme et... lui donne la joie... Hélas elle a été largement remplacée par le blé, plus rentable, mais sans comparaison nutritive.
Le Dr Herzka, médecin allemand aujourd’hui décédé, a étudié et vérifié scientifiquement ses conseils et ses recettes de santé. Ses découvertes, entre autres sur le galanga (plante pour le cœur selon Hildegarde), a fait sa renommée internationale et l’a encouragé à continuer et à approfondir ses écrits.
Son successeur, le Dr Strelow, a approfondi son enseignement et a conseillé ses remèdes auprès de milliers de patients avec succès.
C'est ainsi qu'une alimentation saine dans un environnement adéquat, associée avec l’oraison, le chant, la marche, l'équilibre dans la satisfaction des besoins, permettent au corps de se faire oublier. Celui-ci peut ainsi assister l'âme dans son ascension vers les sommets.
En consommant surtout les aliments et les plantes de la joie tels l’épeautre, le fenouil, les châtaignes... il est possible de nous transformer, dans notre fonctionnement organique, tissulaire et cellulaire

Aujourd’hui, des ouvrages sont consacrés à cette partie de son œuvre. Des sociétés, comme par exemple l’ « Institut Hildegardien » ou « La maison de Ste Hildegarde », diffusent des produits alimentaires « dont elle a souligné les mérites pour la santé, des compléments alimentaires à base de plantes dont elle a donné les recettes dans Physica I et II et dans « Les causes et les remèdes ». Ils affirment travailler en lien étroit avec des naturopathes qui ont étudié la manière de soulager et de guérir selon les écrits de Sainte Hildegarde.

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Des tisanes bios « inspirées librement de ses enseignements » portent également son nom. Ses recettes sont également sur des sites de cuisine ou d’herboristerie. Des instituts spécialisés dans le bien-être s’en réclament !

6 - Conclusion

Cette sainte très éclectique, oubliée du 14 ème au 20 ème siècle, siècles trop sages et trop masculins a été redécouverte à la fin des années 80 comme docteur de l’Eglise, musicienne et médecin diététicienne !

J’espère que cet article vous donnera au moins envie d’écouter sa musique !

 

7 – Références : Régine Pernoud, livre ; Wikipedia ; Université de Strasbourg ; Institut Hildegardien ; La maison de Ste Hildegarde à Reims ; YouTube ; etc.

 

 

 Article mis sur mon blog le 28 08 2015



28/08/2015
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